Nourriture à volonté et obésité du chat domestique

Le chat au régime…

Pour diverses raisons, multitude de propriétaires de chats ont choisi de limiter le nombre de repas quotidiens de leurs compagnons félins. Les principaux motifs retrouvés sont une imitation du mode d’alimentation du chien ou une peur de prise de poids après stérilisation, et par habitude ou manque d’information, on oublie de se poser la question de la quantité de repas nécessaires au chat.
Eh bien, posons-nous cette question ici…

Combien de repas mon chat doit-il faire par jour ?

Si on se calque sur le chien, on lui donnera 1 ou 2 fois dans la journée, et si on s’adapte à notre rythme alimentaire, on le nourrira 3 ou 4 fois quotidiennement : mais le chat est-il fait comme le chien ou l’humain ?

L’Homme et le chien chassent en groupe à l’état « naturel », et la force du nombre permet de chasser peu souvent car autorise la capture de grosses proies : les rations ingérées après une traque fructueuse sont ainsi importantes, et les prises alimentaires espacées.

Le chat, lui, est solitaire. Il ne peut donc pas compter sur l’aide de congénères pour attraper de gros animaux et doit se contenter de petits (tels souris, oiseaux, lapereaux, reptiles, insectes, …). Il est conséquemment obligé de se mettre en quête de nourriture plus souvent.

On le sait : la Nature est bien faite et elle attribue des caractéristiques physiques et physiologiques aux animaux selon leurs besoins, environnements et modes de vie. C’est pourquoi elle a doté le chien et l’humain d’un grand estomac et/ou de longs intestins (pour permettre la digestion de festins généreux) et alloué le contraire au chat.
Et si on sait désormais également que les organismes vivants sont capables de s’adapter à un changement pour survivre, on constatera que les prodiges naturels exigent tout de même un temps certain… Pas étonnant alors que notre chat domestique n’ait pas augmenté le volume de son estomac ni allongé ses intestins, si on sait que juste une partie d’entre eux a vu son nombre de repas quotidiens diminuer et qu’il y a seulement environ 150 ans que l’Homme a commencé à cloîtrer une petite partie d’entre eux totalement en intérieur, sans possibilité de chasser à leur convenance.

Le métabolisme félin est par conséquent resté le même : fait pour manger peu, mais souvent (10 à 16 fois par 24 heures), et réduire le nombre de ses repas va à l’encontre de ses besoins naturels, fait qui est rappelé au chat par l’arrivée de la faim…

Vu tout ce qu’il mange, mon chat ne peut pas avoir faim !
C’est une réponse fréquente aux affirmations précédentes, et qui semble dotée de bon sens. Cependant, la quantité ne fait pas tout… Rappelons-nous ces repas trop copieux qui nous ont laissés avec des douleurs d’estomac, un mal-être général et souvent un besoin de jeûne en conséquence. C’est ce que ressent – plus ou moins – tous les jours le chat rationné : il sait d’expérience que son prochain repas sera tardif, alors il mange tout ce que son estomac peut supporter dès qu’il le peut, en prévision de la faim à venir. Et son corps n’étant adapté ni à la privation (il supporte très mal une diète de plusieurs heures) ni à un trop-plein d’aliments, minou se retrouve en inconfort digestif constant à passer de vide à excès sans arrêt.
Pour se mettre à sa place, imaginons-nous ne faire qu’un seul repas tous les 3 ou 4 jours… Nul doute que nous ne serions pas au top de notre bien-être et de notre moral ! Pas étonnant alors que certains chats deviennent irascibles, voleurs de nourriture, persécuteurs, stressés, agressifs, … Ces compagnons rationnés prennent même souvent du poids, puisque l’organisme ne peut s’adapter convenablement :
Nombre de repas insuffisant -> faim -> grosse prise en quantité -> surplus stocké sous forme de graisses.
On peut donc souffrir de faim tout en étant grassouillet !

Mon chat est rationné et il va très bien !
Si certains petits félins développent conduites agressives (voir précisions sur le syndrome du tigre en dessous), malpropreté, miaulements ou grattages intempestifs, tous les chats ne transforment pas en comportements gênants leurs stress et frustrations. Il est alors naturel de penser que leur bien-être est réel puisque nous ne percevons pas de signaux nous alarmant sur le contraire : un bon comportementaliste pourra vous expliquer les signes indicateurs de stress/contrariété et vous éclairer sur les points qui pourraient être modifiés afin d’optimiser le confort général de votre partenaire de vie (pas uniquement sur l’alimentation : un entretien peut donc s’avérer bénéfique sur bien des points !).

Mais rappelons-nous que le système digestif du chat n’est absolument pas fait pour un jeûne de plusieurs heures : c’est pourquoi un espacement trop important entre les repas n’est pas adapté à ses besoins biologiques et va immanquablement tourmenter votre animal par la sensation de faim.

Si vous lisez cet article, c’est que vous vous préoccupez du bien-être de votre chat : n’hésitez pas en ce cas à vous renseigner plus à fond si vous doutez toujours du fait que votre compagnon souffre de ne manger que quelques fois dans la journée.
bien nourrir son chat

Le syndrome du tigre :

Il est impossible de savoir tout sur son chat, même pour un passionné. Ainsi, nous commettons tous des erreurs par ignorance, et si certains de nos petits félins ne montrent aucun signe visible pour nous d’inconfort, d’autres nous le signalent parfois par des comportements qui vont nous alerter, comme avec le développement d’un syndrome du tigre, lorsque notre distribution alimentaire est mal adaptée et que notre chat a du mal à contrôler son ressenti.

« Naturellement, le chat se nourrit en petites quantités tout au long de la journée. C’est donc une erreur que de vouloir lui administrer sa ration journalière sous la forme de deux copieux repas quotidiens. Excédé par la faim, tourmenté par l’attente, le chat (…) peut même aller jusqu’à agresser violemment ses maîtres. Une forme de boulimie peut accompagner ces symptômes. » (Centre Presse)

« le syndrome du tigre est une agressivité déclenchée par la faim » ; « le chat qui vit enfermé, et qui ne mange qu’une fois par jour, peut présenter le syndrome du tigre : cela se traduit par des agressions sur les propriétaires, (…). La mise à disposition de croquettes à volonté, et l’enrichissement de la maison en jouets permettant au chat de simuler la chasse et la capture, permettent généralement de résoudre le problème. » (Clinique vétérinaire C/V)

« Ce trouble est lié à un rythme de distribution alimentaire inadapté. Nous l’avons vu, le chat consomme de petites quantités de nourriture tout au long de la journée. Une distribution de sa ration en deux gros repas quotidiens ne convient donc pas à ses attentes. » (Thèse vet-alfort.fr)

Voir aussi le sujet sur vetopsy.fr

Comment faire alors ?

 

Comme souvent : il faut respecter ses besoins physiologiques naturels (c’est pourquoi nous recommandons de choisir également attentivement le type des aliments que vous lui proposez, notamment des croquettes sans céréales si ce sont des croquettes) et lui permettre de faire entre 10 et 16 prises alimentaires sur 24 heures. Bien sûr, cela semble infaisable de lui donner à manger toutes les 2 heures (y compris la nuit), on va donc tout simplement se fier à son instinct de préservation et lui proposer une alimentation à volonté (c’est à dire que de la nourriture doit être disponible 24h/24, sans surveillance de quantité journalière), pour qu’il se régule lui-même. Dans la majorité des cas, le chat trouvera son équilibre et un poids de forme, mais :

– le fait que le chat d’intérieur n’ait pas besoin de chasser pour se nourrir diminue ses dépenses énergétiques et peut conduire à un léger surpoids (peu problématique) par manque d’activité physique.

– une petite partie des individus ne va pas s’autoréguler : il peut donc survenir à contrario un lien inverse, qui va lier la nourriture à volonté à l’obésité.

Et alors, si votre compagnon grossit de trop, il existe des solutions pour remédier à ce souci sans créer de frustration et d’inconfort à cause de la faim :
– Plus il fera d’exercices, plus il dépensera d’énergie et moins il mangera  à cause du stress ou de l’ennui : on peut augmenter la fréquence des séances de jeu et/ou de sorties, enrichir son milieu pour l’inciter à se bouger plus (ajout d’étagères, d’endroits où grimper, alterner régulièrement ses jouets pour qu’ils gardent leur attrait, mettre sa nourriture en plusieurs petites quantités dispersées à des endroits qui exigent un peu de sport, …)
– On peut lui compliquer l’accès au stock de croquettes : s’il doit travailler pour obtenir sa nourriture, en bon partisan du moindre effort, il limitera sa consommation à ses besoins. L’investissement dans des gamellesturn-around
d’occupation est alors largement compensé par les économies de
croquettes et des éventuels futurs frais vétérinaires liés aux problèmes
de surpoids (diabète, hépatite, maladies cardio-vasculaires, affections
articulaires, calculs urinaires, troubles cutanés, …). De plus, il mangera
moins vite et sur plus longtemps, améliorant sa digestion.
(attention au choix du distributeur : certaines actions demandées peuvent
s’avérer faciles à contourner, comme sur le Pipolino ou le Labyrinthe de
Catit, ou encore demandent un trop faible effort, comme la Karlie Flamingo ou le Tunnel Feeder)

– Il existe des gammes d’aliments prévus pour limiter la prise de poids : vérifier principalement les pourcentages de glucides (privilégier les marques sans céréales, et pour calculer :
le taux de glucides = 100 – [lipides + protéines + fibres + cendres + humidité]) et regarder aussi le taux de graisse afin de comparer avec sa nourriture habituelle et opter pour moins riche.
– En augmentant le nombre de repas humides (boîtes, viandes, proies), on remplit son estomac avec des aliments moins caloriques car plus riches en eau. La viande crue (une cuisse de poulet entière par exemple, mais peau retirée à cause des graisses) demande un travail plus important au chat et nécessite en conséquence un temps d’ingestion supérieur pour une même quantité, ce qui l’occupe un peu plus et accentue son sentiment de satiété tout en lui faisant plaisir.
– Et si vraiment il faut passer au niveau supérieur, proposer 2 à 3 fois par jour des courgettes cuites est l’idéal pour tromper la faim tout en arrivant à des apports énergétiques quasi nuls (la majorité des chats en raffolent, mais on peut les mélanger au besoin à moitié avec de la nourriture en boîte).

Conclusion :

Permettre au chat de s’alimenter aussi souvent que son corps l’exige est donc généralement la meilleure façon de le préserver du surpoids, d’améliorer son bien-être général et digestif, mais c’est également fortifier le relationnel homme/chat, puisque le propriétaire n’est plus perçu comme celui qui inflige la faim (négatif) mais comme celui qui apporte son confort alimentaire (positif).

Et si la vie peu active du chat d’intérieur contribue parfois au stockage de quelques réserves, nous disposons aujourd’hui de solutions efficaces pour régler le souci sans frustrer nos fidèles compagnons.

Un grand merci à Vanessa Gasser,  comportementaliste spécialiste du chat que nous apprécions particulièrement

 

Pour marque-pages : Permaliens.

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